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Giles Clarke – Yémen : conflit et chaos

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Photographe documentaire, Giles Clarke à été sélectionnée pour exposer son travail sur le Yemen à l’occasion de la 33ème édition de Visa pour l’image.

Pour l’occasion nous avons échangé avec Giles, son état d’esprit à la veille de cette première, sa manière de travailler le tirage et ces débuts comme tireur à Londres. Découvrez cet échange en intégralité suivis d’une présentation de sa série “Yemen : conflit et chaos”.

Cette petite fille et sa famille ont fui les combats et sont à Marib depuis une semaine. Ils attendent de savoir s’ils ont droit à une aide d’urgence de l’ONU de 150 dollars. Centre de distribution d’aide en espèces du HCR, Marib, Yémen, décembre 2020. © Giles Clarke pour l’ONU / OCHA Photo libre de droit uniquement dans le cadre de la promotion de la 33e édition du Festival International du Photojournalisme “Visa pour l’Image – Perpignan” 2021

L’importance d’exposer à Visa pour l’image.

“C’est très important pour moi d’être sélectionné pour Visa pour l’image – Perpignan. Je respecte profondément la vision de Jean François et de son équipe. Ce festival est unique en ce qu’il se consacre uniquement au photojournalisme et au reportage. Parmi tous le festival, c’est celui ou, nous les photojournalistes, voulons montrer notre travail en premier.

Les débuts à Berlin-Ouest

Après avoir quitté l’école au Royaume-Uni, je ne savais pas quoi faire de ma vie alors j’ai déménagé à Berlin-Ouest au milieu des années 80. J’ai rapidement travaillé comme assistant camera 16mm pour une société de production d’informations, je passais mon temps libre à photographier les rues de Berlin-Ouest .

J’ai rapidement construit ma propre chambre noire dans l’appartement d’un ami et j’ai commencé à prendre des photos. Ma toute première mission était à Berlin-Est pour le Daily Express britannique à Berlin-Est en 1986 – un travail qui m’a fait arrêter et détenu pendant 12 heures dans une cellule à Checkpoint Charlie. J’ai été interdit d’entrer en Allemagne de l’Est pendant un an !

Berlin-Ouest à l’époque était un endroit étrange où vivre – une scène artistique fantastique mais encore beaucoup de ruines de guerre partout. La ville était entourée d’un haut mur et de gardes armés. Les trois années où j’ai vécu là-bas ont été un moment fort pour moi. C’était une ville grise mais visuelle… et l’endroit où j’ai eu pour la première fois envie de raconter des histoires avec une caméra.

J’ai utilisé un appareil photo Olympus OM2 et un film Kodak Tri-X. Je photographiais la ville pendant quelques jours, puis je disparaissais dans la chambre noire pour quelques longues nuits de développement et d’impression de films. C’était mon propre apprentissage vivant… et là où tout a commencé. faire l’amalgame entre le photographe et le sujet photographié. Cette distinction est importante.”

L’apprentissage du tirage photographique.

“J’ai travaillé pendant 10 ans en tant que tireur noir et blanc professionnel avec la plupart des travaux orientés vers la photographie commerciale comme la mode et la beauté. Pour moi, il s’agissait toujours de comprendre l’équilibre entre les niveaux de gris, la tonalité et le cadrage – et ensuite cette relation subtile avec le sujet dans l’image.

J’ai aussi appris à travailler vite et sous la pression du temps, ce qui m’a beaucoup aidé depuis. Travailler dans le studio Avedon au milieu des années 1990 a été un moment fort – traiter des négatifs de film 10 par 8 et imprimer des feuilles contact pendant la nuit. Il descendait tôt le matin et voyait comment nous allions.

La relation tireur-photographe.

Un bon tireur doit comprendre ce que le photographe essaie de dire ou de communiquer. Souvent, nous expérimentons différentes chimies et différents papiers. Comment créer une série d’images qui communique au mieux la vision du photographe pour cette histoire particulière ?

En fin de compte, il s’agit de comprendre les niveaux de gris et de savoir comment les utiliser. Une telle gamme de tons était possible avec un bon négatif. Pensons-nous à un look doux et tonal ou allons-nous pour une sensation dure et contrastée ? Il s’agissait toujours d’explorer les possibilités. Toutes ces réflexions m’ont aidé aujourd’hui lorsque je retouche des images – en couleur ou en noir et blanc.

Je dis souvent aux étudiants en photographie que si jamais vous avez la chance de travailler dans une chambre noire, faites-le ! Je pense que c’est une partie créative importante du processus…..travailler avec de la lumière projetée, un négatif et du papier photo revient à l’essentiel et il faut poser différentes questions… contrairement au fait de rester assis devant un ordinateur.”

2019 – 2021, une période particulière.

“J’habite à Harlem NY et j’ai couvert les protestations des infirmières et du personnel médical pendant les premiers jours sombres de la pandémie. Je parcourais la ville dans différents hôpitaux. J’ai également passé 6 semaines au Yémen en novembre et décembre 2020, ce qui constitue l’essentiel du travail qui sera exposé dans mon exposition à Perpignan cette année.

La pandémie a également été un moment important pour moi car elle m’à imposée d’arrêter de voyager un instant. J’avais besoin de revenir sur les dernières années de travail et de réapprendre à être à nouveau immobile. Courir vers des zones de conflit tous les deux mois devient fatiguant… et il y a plein histoires qui se passent en bas de ma rue, à Harlem et qui méritent d’être racontées.”

Des migrants d’Afrique de l’Est arrivés à bord de bateaux de passeurs depuis l’Afrique du Nord attendent les contrôles sanitaires assurés par une équipe médicale mobile de l’Organisation internationale pour les migrations. Ras Al-Ara, Lahij, Yémen, novembre 2020. © Giles Clarke pour l’ONU / OCHA Photo libre de droit uniquement dans le cadre de la promotion de la 33e édition du Festival International du Photojournalisme “Visa pour l’Image – Perpignan” 2021

Giles Clarke, au coeur du chaos.

En mars 2015, une coalition dirigée par l’Arabie saoudite et soutenue par plusieurs gouvernements occidentaux dont les États-Unis, la France et le Royaume-Uni, a lancé une campagne de bombardements aériens intense et prolongée contre le Yémen. Selon l’ONU, la guerre a fait au moins 230 000 victimes. Une grande partie des infrastructures déjà fragiles du pays ont été détruites.

La coalition militaire est intervenue après que les rebelles houthis ont renversé le gouvernement reconnu par la communauté internationale à la fin de 2014. À mesure que la guerre s’étendait, les Houthis se sont progressivement rapprochés de l’Iran et ont pris le contrôle de vastes régions du Yémen.

Les civils premières victimes collatérales.

Depuis 2015, la guerre se mène sur de nombreux fronts qui ne cessent de se déplacer, d’Hodeida sur la mer Rouge à la ville aujourd’hui divisée de Taïz. En 2020, des combats ont éclaté dans la région désertique de Marib alors que les Houthis cherchaient à rejoindre les champs pétroliers du pays. Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, près de quatre millions de personnes ont dû fuir et vivent désormais dans des camps pour déplacés internes.

Le Yémen est confronté à la plus grande crise humanitaire au monde, et le prochain chapitre de cette tragédie s’annonce encore sombre. Les Nations unies estiment que la plupart des victimes de la guerre sont mortes de « causes indirectes », à savoir la maladie et la famine. Depuis le début de la pandémie mondiale en mars 2020, la propagation du Covid-19 a été difficile à suivre au Yémen. Les rapports sont invérifiables et les infrastructures de santé insuffisantes, mais des images satellites ont révélé plusieurs fosses communes dans certaines zones.

Une situation mouvante.

Depuis 2016, la coalition dirigée par l’Arabie saoudite continue d’imposer un blocus sur les biens de première nécessité dans les ports de la mer Rouge desservant une grande partie du nord du Yémen, et les denrées alimentaires sont inabordables en raison des restrictions portuaires et de diverses complications. Avec l’évolution permanente des lignes de front entre les forces gouvernementales yéménites et les forces houthies ainsi que la présence d’Al-Qaida et d’autres groupes militants dans le pays, les combats incessants ont interrompu la distribution de l’aide humanitaire, et la menace de la famine commence à planer sur le pays.

L’exposition montre un pays fracturé par la guerre et les rivalités tribales, un pays où les civils sont condamnés à une lutte perpétuelle, piégés dans un présent hanté.

Texte : Giles Clarke pour Visa pour l’image

Ces reportages ont été réalisés avec l’aide de l’ONU (UN OCHA)

Des enfants dans leur ancienne salle de classe détruite par une frappe aérienne en juin 2015. Les cours sont maintenant dispensés sous des tentes de l’UNICEF. Depuis le début de la guerre en 2015, plus de quatre millions d’enfants sont privés de scolarité. École Aal Okab, Saada, Yémen, avril 2017. © Giles Clarke pour l’ONU / OCHA Photo libre de droit uniquement dans le cadre de la promotion de la 33e édition du Festival International du Photojournalisme “Visa pour l’Image – Perpignan” 2021

Exposition de Giles Clarke, “Yemen, Conflit et Chaos” est visible dans le cadre du Festival Visa pour l’image au Couvent de Minimes du 28 août au 26 septembre 2021 de 10h à 20h, entrée libre

Retrouvez prochainement une interview de Giles Clarke dans notre podcast MANDARINE.



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